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19 août 2009 3 19 /08 /août /2009 05:42


publié par
babelouest (crisonnier) le 16/08/2009 10H51

Lu sur le Blog de Bruno Fay, journaliste indépendant - 03 août 2009

 

RTL a réalisé ce matin un petit sujet sur les nègres politiques. Pour les curieux, j’ai publié il y a peu sur mon blog une enquête bien plus complète sur le sujet. Je profite de l’occasion pour “poster” ci-dessous un entretien réalisé l’an passé avec le fort sympathique Eric Dumoulin. Conseiller en communication politique, Eric Dumoulin a prêté sa plume pour de nombreux hommes politiques français. Il règle ses comptes dans un livre très drôle, Politiquement Nègre (éd. Robert Laffont).

 

Politiquement nègre - Eric Dumoulin

Votre premier souvenir ?
Mon premier discours, c’était en 1992-1993, lorsque j’étais en cabinet ministériel. La première fois que l’on entend ses mots, cela fait rire. On, est un peu flatté, on a l’impression d’entrer dans le cénacle politique. On a l’impression de participer au grand jeu du pouvoir. Après, avec le temps, il y a beaucoup d’impostures qui m’ont beaucoup moins fait rire. Certains, ça ne les gêne pas de prononcer pendant dix ans des discours qu’ils n’ont pas eu le temps de lire.

Dans votre livre, vous distinguez le rôle de nègre politique de celui de plume.
Je fais la différence entre écrire un livre pour un politique et rédiger un discours pour un ministre. L’écriture d’un discours participe d’un travail qui me parait normal. Un ministre bosse 14 heures par jour, passe sa vie en réunions ou en représentations. Il n’a pas forcément le temps d’écrire des discours sur tout. En revanche, je trouve profondément choquant qu’un homme qui aspire à un rôle politique de premier plan n’écrive pas lui-même ses livres. Et je suis aussi choqué par le manque de transparence. Vous ne verrez jamais un politique qui publie un livre remercier publiquement sa plume. S’il y a une imposture absolue à dénoncer, c’est que 80% des hommes politiques n’écrivent pas leur livre ! Le pire, c’est qu’ils finissent par croire, avec le temps, qu’ils l’ont réellement écrit eux-même… Il y a une vraie omerta sur le sujet.

Avez-vous écrit beaucoup de livres ?
Un certain nombre, oui. Aujourd’hui, tous les hommes politiques veulent leur livre. Les troisièmes couteaux écrivent un bouquin pour exister et essayer de se faire reconnaître par leurs pairs. Pour eux, c’est un moyen de promotion interne au sein du sérail en vue d’un hypothétique strapontin ministériel. Pour les seconds et premiers couteaux, c’est un outil de conquête du pouvoir et de conviction auprès du public. Il est désormais inconcevable de se lancer dans une grande campagne politique ou à l’assaut d’un parti sans écrire un bouquin. C’est devenu un incontournable.

Eric DumoulinComment étiez-vous payé lorsque vous écriviez des livres pour des politiques ?
Depuis quelques années, les nègres littéraires sont associés aux droits d’auteur. C’est loin d’être le cas dans l’édition politique où nous vivons encore dans la négritude la plus totale. Avant 1993, les députés avaient des associations, des petits trésors de guerre où ils puisaient pour payer leurs nègres sous forme d’honoraires en s’abritant derrière des factures aux intitulés très pudiques comme “recherche de documentation”, “organisation de publication”, etc. J’ai aussi été payé en cash ou bien en tant que salarié. Quand on est président de collectivité ou député, il suffit de recruter quelqu’un, officiellement comme collaborateur, pendant un temps donné qui correspond au prix estimé du travail littéraire. Le salaire net moyen pour un livre politique est compris entre 10 000 et 15 000 euros. Pour les plus gros coups, ça peut monter à 25 000 euros.

Quelle est l’influence du nègre sur l’homme politique ?
Tout dépend de l’élu pour lequel on travaille. Je fais de temps en temps passer quelques idées personnelles quand un sujet m’inspire. J’ai par exemple écrit en 1994 un livre sur l’élargissement européen pour le compte d’un homme politique que j’aurai bien aimé signer de mon nom… Mais en général je suis beaucoup en pilotage automatique.

Quelles sont les limites à ne pas dépasser ?
D’abord, il y a les limites que l’on s’impose. Il m’est ainsi arrivé d’écrire pour un sénateur et ancien ministre des discours aux accents extrêmement poujadistes, très borderlines, qui flirtaient dangereusement avec des thèses extrêmes. Cela ma profondément gêné.. J’ai terminé ma commande puis j’ai préféré interrompre notre collaboration. Ensuite, il y a les limites démocratiques. Aider un homme politique à écrire ses livres ou ses discours relève du fonctionnement normal de la démocratie sauf quand ça va trop loin, lorsque la plume politique finit par prendre la place du politique. C’est à-dire qu’il ne se contente pas d’écrire mais qu’il souffle ses idées au politique. Je pense par exemple à Henri Guaino. Son influence à l’Elysée va très au-delà de ce que pouvait être l’influence d’Erik Orsenna lorsqu’il écrivait pour Mitterrand. Erik Orsenna était une plume au sens traditionnel mais n’influençait pas la politique mitterrandienne alors que Guaino a un pouvoir d’influence extrêmement fort sur Sarkozy qui outrepasse le rôle de plume.

Propos recueillis par Bruno Fay

 


 

Lu sur le Blog de Bruno Fay, journaliste indépendant :

http://investigation.blog.lemonde.fr/2009/08/03/profession-negre-politique/

Profession : nègre politique


http://www.dazibaoueb.fr/article.php?art=5520

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