Les lyncheurs ont eu la peau d’Anelka. Attention, ils préparent les cordes pour les autres. D'où certainement cette réaction de défense des autres joueurs qui ont tenu à montrer leur insoumission.
Un rassemblement hétéroclite de journalistes revanchards, de grands inquisiteurs de la sainte morale républicaine et de personnalités opportunistes a sorti les chasubles blanches, les croix enflammées et les cordes. Une impression de chasse à l’homme. Un sentiment horrible pour des joueurs déjà secoués par leur défaites.
Et toute la France ou presque s’est mise à hurler avec les loups: A mort Anelka! Sans compter les qualificatifs racistes.
Mais tout ça part de quoi au fait ?
Apparemment, un litige oppose certains cadres de l’équipe au sélectionneur. Un différend sur la tactique, la composition des titulaires. Comme l’a dit Gérard Janvion. Cette équipe n’a pas de meneur de jeu. C’est flagrant. On peut donc penser que les joueurs, bien conscients de cette carence ait imaginé des solutions.
Avant France-Mexique, le bruit court que quatre joueurs auraient rencontré Domenech pour lui proposer un système de jeu. Certains disent que Zidane était derrière mais l’intéressé dément. Le sélectionneur aurait donné son accord avant de se raviser et remettre en place le même système de jeu que contre l’Uruguay.
On peut donc imaginer une certaine déception chez les joueurs et peut-être de la colère chez Nicolas Anelka à la mi-temps du match.
C’est sans doute ce qui l’a poussé à proférer des mots grossiers, injurieux dans le vestiaire, sans doute comme quelqu’un qui râle à voix haute dans son coin. Etait-ce si grave finalement ? Il me semble que dans les tous les lieux où des gens travaillent ensemble, cela arrive tous les jours ! Non ? En tous cas, cela pouvait se régler en douceur, en interne comme ils disent.
Mais le journal « L’équipe » tenait son scoop alors pourquoi se gêner quand il y a du fric à se faire?
Tout comme TF1, tout comme l’ensemble de la presse sportive, tout comme les sponsors, le journal « L’Equipe » sentait que l’élimination probable de l’équipe de France allait lui faire perdre de grosses sommes d’argent. Il fallait donc le leur faire payer bien avant l’instant inéluctable et s’assurer de grosses ventes en un seul scoop.
Nicolas Anelka était le bouc-émissaire parfait. Sa côte n’a jamais été très bonne. Et puis, au contraire de Cantonna, taciturne mais sanguin et chaleureux, Anelka est froid; en plus, il est noir, il a un visage de bad boy et il vient des cités pauvres de banlieue.
Pas un journal, pas une personnalité n’a protesté contre ce titre d’une vulgarité affligeante, affichant des propos non confirmés, attribués à Anelka sur de simples oui-dires.
Si Anelka avait été un membre de l’élite politique, il aurait pu déposer plainte pour diffamation et sans doute gagner puisque les joueurs démentent qu’il ait tenu ces propos-là dans les conditions rapportées par l’Equipe.
Cela montre que, même avec le statut de star du ballon rond, un joueur de foot reste un blaireau. Rappelez-vous Lilian Thuram, accusé par Sarkozy et l’UMP de ne pas rester à sa place en prenant des positions politiques. Un footballeur ne doit pas avoir de cerveau, juste des jambes. Et des jambes, ça n’a pas de bouche, c’est bien connu !
Un air de révolte est passé sur l’équipe de France. Une mutinerie qui fait du bien à voir. Comme si tout n’était pas joué d’avance, comme si les gens pouvaient refuser le rôle de faire valoir qu’on veut leur faire tenir.
Avez-vous conscience de l’argent que ces footballeurs, bien payés rapportent à leur club, à leur fédération, à la presse sportive, aux chaînes de télé, aux agences de pub, aux sponsors, aux fabricants de produits dérivés ?
Ils sont les piliers sans pouvoir, d’une économie qui se chiffre en dizaines de milliards d’Euros.
Sans eux, le système bat de l’aile puis s’écroule. Je pense qu’à leur place, je prendrais mon pied. Oui, ça doit être jouissif de voir tous ces gens de l’industrie du sport, des médias, de la presse, de la pub, de la politique, bégayer leur rage de se voir contesté pour les uns, de risquer de perdre leur mise financière pour les autres à cause de simples joueurs de football qui ont eu un élan de dignité vis-à-vis d’un des leurs…
Un conseil aux futures vedettes du ballon rond : pesez bien le pour et le contre avant de signer pour l’équipe de France…
Posez-vous cette question simple: Est-ce que la France d'aujourd'hui vaut le coup qu'on se crève le cul pour elle?
Auteur : Milton Dassier - Source : Milton Dassier sur l'actu