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22 janvier 2010 5 22 /01 /janvier /2010 01:00


Le journalisme à la papa est mort hier et on ne le pleurera pas. Finies les investigations laborieuses et les thunes de l’État gaspillées pour que des types jouent l’Albert Londres en des terres mêmes pas françaises : place au journalisme responsable ! Les mesures gouvernementales vont enfin mettre de l’ordre dans une profession qui se croyait au-dessus des lois. Revue de détails.

Journalisme, année zéro

Ça couvait depuis un moment. Le Président, en ébullition, avait de plus en plus de mal à contenir son courroux. Et les Français, conscients du problème, étaient prêts à embrayer. Trop longtemps que quelques apprentis Tintins en goguette coûtaient bonbon à la nation pour des clopinettes, sous-Kessel de pacotille incapables de lire correctement leur Guide du Routard.


L’affaire des deux journalistes retenus en otage en Afghanistan parce qu’ils se croyaient dans un remake de SAS nique le Mollah Omar a mis le feu aux poudres. Et l’ordre de l’Élysée est tombé hier : puisque les journaleux sont irresponsables, ils resteront désormais là où on peut les contrôler : en France ou dans les environs (Suisse, Liechstenstein et peut-être Monaco si la situation y reste stable).

Sage décision.


Car les deux reporters inconscients qui batifolaient en terre afghane comme s’il c’était la Creuse ne sont que les derniers d’une longue lignée. Claude Guéant l’a rappelé hier dans une conférence de presse : « Le contribuable français va encore devoir raquer un max parce que deux irresponsables sont allés faire les débiles en territoire barbu. Cette fois, c’en est trop. Après Aubenas, Malbrunot, Kieffer et tous les autres, on en tire les conclusions nécessaires : interdiction absolue de vadrouiller en zone dangereuse. Finie l’époque des boys-scouts et des Rouletabille. On réinvestira l’argent ainsi économisé dans la moralisation du capitalisme, c’est du gagnant-gagnant.  ».




Ce que le contribuable ne verra plus. Merci qui ?


Le raisonnement est limpide. Puisque les journalistes ne savent pas suivre les plus élémentaires consignes de sécurité et que leurs rédactions ne mettent pas les freins nécessaires à leurs dérives, il convient que l’État lui-même leur fixe des interdits, et pas seulement géographiques : d’autres données seront prises en compte (état de santé, présence à la garden-party de l’Élysée, couleur politique etc…). « Ce sera une sorte de code de la route pour journalistes, a déclaré François Fillon. Plus question de leur laisser faire n’importe quoi , on va veiller à ce qu’il n’y ait plus de sortie de route. C’est pour leur bien.  »

Devant la levée de boucliers chez certains des vieux grognards de la corporation, toujours prêts à crier à l’abus de pouvoir, Jean François Coppé a embrayé dans la soirée : « J’entends déjà les critiques qu’on va nous faire, sur la baisse de qualité de l’info, la fin des enquêtes, le nivellement par le bas de l’info, blablabla… Mais on a de quoi répondre ! À l’heure de Twitter et de Facebook, un journaliste n’a plus besoin de partir loin pour accumuler les informations : il suffit qu’il fasse semblant d’être sur place, et tout le monde s’en contente. Regardez Bernard Henry Lévy : la Géorgie, la Yougoslavie, Gaza… il n’a rien vu et pourtant il raconte plein de choses fascinantes. Et puis, avec de bons décors, on recrée facilement une ambiance… Quelques tubes de gouache, une heure de boulot, et on a un arrière-fond parfait pour un direct depuis Tora-Bora. Les journaux vont faire de réelles économies et les réinvestir dans de la vraie info. »



Un Journaliste, lui ? Peuh, il n’avait même pas Twitter…


Interrogés, les principaux directeurs de journaux hexagonaux se sont félicités de la décision du gouvernement. « Franchement, notre métier n’est pas de s’inquiéter pour notre personnel mais de le protéger. De toute manière, la plupart du temps, on faisait semblant d’avoir quelqu’un à l’étranger et on pompait l’AFP. Ces mesures ont l’avantage de clarifier les choses », remarque ainsi Laurent Joffrin, visiblement ravi. Du côté des chaines de télé, même son de cloche. Nonce Paolini, directeur général de TF1 déplore simplement que l’on autorise la Suisse comme terrain d’enquête : «  Même s’ils ont légiféré sur les minarets, ils restent assez poreux aux fondamentalistes, ça peut être un danger. Pourquoi pas autoriser la Belgique tant qu’on y est ? »


Autre innovation, l’Élysée songe à instaurer un prix Pulitzer hexagonal basé sur un système de loterie. Fini le temps où quelques casse-cous raflaient les récompenses et les honneurs ; un simple journaliste à la Gazette de Triffouillis pourra bientôt remporter la récompense suprême en matière d’enquête. Nul doute qu’une saine émulation s’instaurera entre les rédactions et que l’Investigation avec un grand I en sortira gagnante.


Enfin, cerise sur le gâteau, le gouvernement prépare la sortie d’un Guide du Routard du journalisme responsable (et durable) afin de conseiller au mieux les chasseurs d’images et de témoignages. Tous les cas de figure seront abordés. Besoin urgent d’une vidéo de pirates somaliens ? Allez-donc faire un tour à Disneyland, les Pirate des Caraïbes y sont criants de vérité. Un plan manquant pour compléter un reportage sur les écoles en Afghanistan ? Foncez dans les squares parisiens ou à Calais, les Afghans y sont encore nombreux (juste, dépêchez-vous avant qu’il n’en reste plus, ils se font de plus en plus rares en nos contrées). Pas d’adresse pour aller déjeuner avec votre boss Christophe Barbier mardi prochain ? Pas d’inquiétude, il adore les vermicelles de truffes de chez Marco Piunzinelli, dans le 16e. Des bons plans à foison…




Marre des plans galères, ami journaleux ? Le gouvernement est là pour toi.


L’homme nommé rédacteur en chef de ce guide, meilleur journaliste de France depuis plusieurs décennies, PPDA, nous en dit plus : « C’est toute une organisation qui se met en place. On va faire comme pour les plages : il y aura les zones vertes (journalisme autorisé sans restriction), les zones oranges (journalisme autorisé si embedded, Twitter conseillé), les zones rouges (réservées à BHL, Twitter + Facebook conseillés, attendre les conférences de l’Élysée avant d’écrire son billet) et les zones noires (no comment…). Je sais que certains craignent qu’on ne puisse plus faire notre boulot mais c’est du pipeau : comment vous croyez que j’ai interviewé Fidel Castro ? En y allant comme un mercenaire ? Laissez-moi rire… Le journalisme d’aujourd’hui se conjugue différemment, avec une bonne dose d’inventivité et de créativité.  »




Un modèle


Pour finir, le gouvernement ne compte pas en rester là. Fidèle à la devise de Bernard Tapie - Pourquoi acheter un journal quand on peut acheter un journaliste ? - , le Président a décidé que les revenus des journalistes seraient désormais indexés sur leur capacité à respecter les règles édictées en la matières. Le blaireau de journaliste de base y pensera désormais à deux fois avant de prendre des initiatives contre-productives. Nul doute que l’information en sortira gagnante et que des dérives du type Denis Robert/Clearstream ne devraient plus se reproduire. C’est à ce prix - seulement - que notre démocratie pourra renouer avec les vertus d’une véritable presse d’investigation responsable.



Spéciale dédicace, évidemment, au succulent Jean-Pierre Martin.


Grande Démineuse De Tapettes à Gruyère et Pourfendeuse De Cornichons. http:// reineroro.kazeo.com/


http://www.dazibaoueb.fr/article.php?art=10204




Comment Israel musèle la presse indépendante


Jared Malsin, rédacteur en chef de l’édition anglaise de l’agence de presse Maan, vient d’être expulsé d’Israël après avoir été kidnappé, arrêté et mis au secret par les autorités israéliennes. Mya Guarnieri, journaliste en Israël, fait le point sur la fameuse démocratie israélienne et ses mesures de répression, à l’encontre de la presse indépendante comme des militants palestiniens non-violents.

"Quelle démocratie, quelle liberté d’expression ? Et qu’en est-il des gens qu’on kidnappe et emprisonne hors de la juridiction israélienne ? Mesures de répression israélienne contre la presse

par Mya Guarnieri*


Jared Malsin, rédacteur en chef de l’édition anglaise de l’agence de presse Maan, a été arrêté par les autorités israéliennes. Malsin, un juif américain qui vit et travaille en Cisjordanie, a été enlevé à l’aéroport international Ben Gourion, alors qu’il revenait avec son co-équipier de vacances en république Tchèque. Après avoir été soumis à huit heures d’interrogatoire, Malsin a été expulsé cette semaine vers les Etats-Unis. Pourquoi ?


Les transcriptions de l’interrogatoire en hébreu obtenues par Maan révèlent que Malsin est considéré comme "un risque pour la sécurité d’Israël", en raison de ses opinions politiques. Les interrogateurs ont fait des recherches en ligne sur les écrits du journaliste, qui comprennent des articles « critiquant l’Etat d’Israël ».


Bien que l’agence Maan, basée à Bethléem, soit identifiée comme un service d’information palestinien, elle est largement connu comme media indépendant, publication dégagée des agendas politiques et elle est doit sa réputation a ses reportages dénués de parti pris. Comme telle, Maan attire un lectorat en constante augmentation, et reçoit plus de 3 millions de visiteurs par mois.

Depuis son arrestation, initialement démentie par les dirigeants israéliens, Maisin a eu peu de contact avec le monde extérieur. Me Daoud n’a eu qu’une brève rencontre avec son client et Maisin a eu une courte conversation téléphonique avec la rédaction de Maan et son rédacteur en chef adjoint George Hale.


En septembre Mohammed Othman, l’important militant du mouvement Boycott Désinvestissement et Sanctions (BDS), a par ailleurs été enlevé par l’armée israélienne, alors qu’il voulait entrer en Cisjordanie par la Jordanie. Othman revenait d’un séjour en Norvège, pays dont le gouvernement s’est récemment désinvesti d’une entreprise israélienne directement engagée dans l’occupation. Othman a été accusé d’avoir joué un rôle crucial dans la décision de la Norvège de se désinvestir. Après des mois de détention administrative sans inculpation, détenu sur la base de "preuves" que ni Othman ni son avocat n’ont été autorisés à connaître, Othman a finalement été relâché le 13 janvier dernier.

Récemment l’armée a arrêté différents leaders de mouvements populaires non violents contre le Mur. En décembre, Abdallah Abu Ramah, coordinateur du Comité populaire de Bil’in contre le Mur a été arrêté et accusé d’incitation et de jets de pierres. Abu Rahamah est aussi accusé de possession d’armes pour avoir brandi des bombes lacrymogènes vides et exhibé des balles de caoutchouc tirées par l’armée contre lui et contre d’autres manifestants, au cours d’une manifestation hebdomadaire non violente tenue dans son village.


Le 12 janvier, Ibrahim Amirah, coordinateur du Comité populaire contre le Mur de Ni’ilin a été arrêté à son tour. Amirah a été détenu et relâché sans charges deux fois dans le passé.

L’armée israélienne a également conduit un raid de nuit contre la maison en Cisjordanie d’une coordinatrice du mouvement ISM (International Solidarity Movement), Eva Novakova, puis l’a arrêtée et expulsée au motif que son visa était périmé."


*Mya Guarnieri, journaliste-écrivain est installée à Tel-Aviv. Elle contribue régulièrement au Jérusalem Post et à The National ; ses articles paraissent aussi dans Outlook India, Newsweek, dans Ha’aretz, ainsi que dans les dépêches de l’agence de presse Maan, au Common Ground News service, à Mondoweiss, à Zeek, au Daily News Egypt, et au Khalej Times.

(Traduit par Carole SANDREL)

CAPJPO-EuroPalestine 

 

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commentaires

E
<br /> Nicolas Ier a tout verrouillé, et d'abord les médias<br /> <br /> Sa fin sera-t-elle celle du Tsar Nicolas ???<br /> <br /> Je ne le pleurerai pas, ni tous ceux qui sont attachés à une presse indépendante !<br /> <br /> cordialement eva<br /> <br /> <br />
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A
<br /> Excellent, je me suis bien amusée en lisant ce long commentaire.  On s'y croirait pour un peu. Et j'espère vivement que les journalistes sauront lutter contre cette mainmise de l'Etat sur leur<br /> profession.  Il y a déjà trop d'agents de presse sous la coupe du Gouvernement de Nicolas 1er.<br /> <br /> <br />
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  • Journaliste de profession. Radio,TV,presse,productrice émissions. Auteur de plusieurs ouvrages chez éditeurs de renom. Milite pour une information libre,plurielle,diversifiée, indépendante des grands groupes.
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