La bataille commence. Daniel Mermet, présentateur du monument Là-bas si j'y suis sur France Inter, s'en prend, dans une lettre ouverte publiée sur le site Bakchich, au nouveau directeur de la station, Philippe Val. Avec ironie, il souhaite la bienvenue à son chef et se moque de la nomination d'un homme qui "tutoie nos plus brillantes personnalités, de BHL à Carla Bruni".
Philippe Val prend la présidence de France Inter ce jeudi, et déjà des mots doux de ses nouveaux employés viennent l'accueillir. Sans surprise, c'est Daniel Mermet, présentateur de l'émission d'opinion Là-bas si j'y suis, qui s'y colle. Le journaliste, détenteur de son programme, qu'il juge lui-même "modeste et génial", depuis 1989, s'oppose depuis longtemps à l'ancien rédacteur en chef de Charlie Hebdo. Il avait notamment pris fait et cause pour Siné dans l'affaire qui l'opposa à Philippe Val, et a toujours contesté ses opinions: sur le référendum sur le traité européen (Mermet était une des voix du non, Val a consacré une longue série d'éditos pour le oui), sur le conflit palestinien, sur Bernard-Henri Levy, sur Nicolas Sarkozy, etc.
Dans une lettre de bienvenue pleine d'ironie, publiée jeudi 18 juin sur le site Backchich, Daniel Mermet dit tout le bien qu'il pense de Val, un "penseur reconnu de l'élite médiatique", qui "tutoie nos plus brillantes personnalités, de BHL à Carla Bruni", "une conscience, un visionnaire, et un penseur engagé face aux grands défis de notre temps", un homme "que l'historien Alexandre Adler compare à Emile Zola. Et pourquoi pas à Voltaire, Spinoza, Albert Londres ou Albert Einstein?". On l'a compris Mermet se moque. Notamment parce que l'ancien rédacteur en chef de Charlie honnit ce que le journaliste de France Inter appelle en rigolant un "gauchisme moisi, souvent entaché d'antisémitisme et d'islamo fascisme".
L'émission déprogrammée?
Mermet critique, toujours dans l'humour, la façon dont Val est arrivé à la tête de France Inter. L'homme, qui "a pleinement réussi à évoluer avec pragmatisme du côté du manche", explique l'homme de radio, a été imposé par Jean-Luc Hees, dont l'arrivée a été fortement souhaitée par Nicolas Sarkozy. Or, Philippe Val ne cache pas son amitié avec Carla Bruni-Sarkozy. "Humides de reconnaissance, les collaborateurs de France Inter n'ont pas encore trouvé les mots pour remercier le Président Sarkozy pour leur avoir choisi un tel chef, et c'est plein d'entrain et de confiance qu'ils s'apprêtent à lui faire la fête. Tout comme l'équipe de 'Là-bas si j'y suis' qui, un petit bouquet de fleurs à la main, trépigne d'impatience", écrit le présentateur de l'émission.
Pourquoi tant de haine? Parce que les deux hommes se sont souvent amusés à se critiquer et à se répondre l'un dans ses émissions, l'autre dans des chroniques qu'il tenait dans la matinale d'Inter. Mais aussi parce que Daniel Mermet est depuis longtemps sur la sellette. En 2006, le programme culte a été forcé de changer de plage horaire. Alors diffusé chaque jour de la semaine de 17h00 à 18h00, l'émission prend la tranche 15h00-17h00, ce qui lui aurait fait perdre 200 000 fidèles, affirme Mermet, qui dénonce la volonté de lui nuire affichée par la direction de la station. Et depuis cet épisode, l'animateur, comme ses "auditeurs modestes et géniaux" (AMG dans le langage de l'émission), sont persuadés que l'émission va être déprogrammée tôt ou tard. Vendredi, Là-bas si j'y suis passera pour la dernière fois de l'année à l'antenne, sans être assurée d'être programmée à nouveau à la rentrée. Et Mermet est certain que Val n'hésitera pas à lui donner le coup fatal. Avec ce texte, le journaliste mobilise déjà ses auditeurs.
Source LeJdd.fr