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20 juin 2009 6 20 /06 /juin /2009 06:29


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LE FIL IDÉES
 - Le fondateur de Reporters sans frontières (RSF) avait surpris son monde en quittant la tête de son association, en septembre 2008, pour diriger, avec le soutien de l’Altesse du Qatar, un improbable Centre pour la liberté des médias, en pleine pétromonarchie. Empêché de travailler, Robert Ménard envisage maintenant de quitter le navire et de rendre les clés à l’émir.

La carte de visite semblait improbable : Robert Ménard, directeur général duCentre de Doha pour la liberté des médias... D’autant plus improbable que Reporters sans frontières, l’ONG de défense des journalistes fondée en 1985 par le même Robert Ménard, classait régulièrement le Qatar au fin fond du tableau de la liberté de la presse, vers la 80e place !

Mais bon, la tentation de Doha a été la plus forte. En 2007, après une première entrevue, facilitée par des journalistes arabes, avec Cheikha Mozah, la deuxième épouse de l’émir, Robert Ménard croyait déjà en sa bonne étoile qatarie. Cette femme influente, décrite par ses visiteurs comme une réformatrice – ou une « despote éclairée », c’est selon – avait répondu favorablement, deux jours seulement après leur entrevue, à la proposition du fondateur de RSF : banco pour la création d’un centre, « un refuge pour tous ceux qui risquent leur vie ou leur liberté pour nous informer », comme dit le site Internet, à la condition que les journalistes secourus « n’appellent pas à la violence, qu’ils n’incitent pas à la haine ». La femme de l’émir s’engageait, à travers sa fondation, à mettre sur la table plusieurs millions de dollars. Une bonne opération de com' pour le petit émirat, patrie de la chaîne d’info Al Jazeera, habitué à soigner son image sur tous les terrains. 

“Je veux que le Centre reste indépendant, 
et pouvoir critiquer le Qatar. 
Sinon, il n'a aucune crédibilité.”

Mais la petite équipe réunie autour de Robert Ménard (qui se rendait lui-même au Qatar environ quinze jours par mois) a vite vu la partie qatarie lui mettre des bâtons dans les roues. En mars dernier, l’ancien secrétaire général de Reporters sans frontières menaçait déjà, sur le site du Nouvel Obs, de quitter Doha, dénonçant la volonté de certains conseillers de l'émir du Qatar de « mettre en place une nouvelle gouvernance où ce serait eux qui auraient la mainmise, où je n'aurais plus mon mot à dire » . « Je veux que le Centre reste indépendant, et pouvoir critiquer le Qatar » disait-il. « Sinon, le Centre n'a aucune crédibilité. Je ne suis pas un alibi, il fallait prendre quelqu'un d'autre qui accepte d'être servile ». Le fondateur de RSF n’avait pas digéré – parmi d’autres choses – que le Qatar bloque l’entrée de journalistes menacés (l’un étant iranien) alors que le Centre de Doha était prétendument là pour çà. 

En mai dernier, devant un journaliste de l’
Agence russe d’information Novosti, Robert Ménard faisait encore semblant d’y croire : « Moi, quand je critique le Qatar, je critique parce que je pense que ça va servir à quelque chose. Bien sûr, je suis optimiste. Le fait même que je puisse dire ça ici, c'est une révolution. Vous croyez qu'en Arabie Saoudite, je peux tenir ce discours-là ? » 

Le président du conseil d’administration du Centre de Doha, Sheikh Hamad Bin Thamer Al Thani – qui n’est autre que le président de la chaîne de télévision Al Jazeera – a visiblement tout fait pour bloquer la machine. Querelle de pouvoir au sein des cercles dirigeants de l’émirat ? C’est la version donnée par l’entourage de l’ex secrétaire général de RSF. 

Robert Ménard,
 l’« entrepreneur du spectacle de la liberté », comme le définit Jacqueline Aubenas, la mère de Florence, découvre que la liberté de la presse n’est pas soluble dans le pétrole et le gaz qataris. Le Centre pour la liberté des médias, qui n’a accueilli que deux journalistes en six mois, se vante d’avoir malgré tout aidé financièrement 200 médias et journalistes en difficulté à travers le monde, en leur distribuant plus de 500 000 dollars.

Pas sûr que Robert Ménard soit invité à l’Elysée, lundi, pour la visite d’Etat du très cher (et très bon client) Cheikh Hamad bin Khalifa Al Thani, l'émir du Qatar, et de son Altesse Cheikha Mozah, la « princesse des sables, belle, moderne et cultivée », comme 
le chante l’hebdomadaire Jeune Afrique.

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