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Vendredi 10 octobre 2008
L'attachée de presse de Theles m'a appelé ce matin. Je n'étais guère habitué jusqu'ici à ce genre de délicate attention. Il a beaucoup été question de journalisme aujourd'hui. J'ai également eu au téléphone Pierre Lévy (journaliste bien méritant) qui s'envole pour Caracas demain.
Le journalisme est une bien noble profession, investie d'ailleurs des privilèges qui vont avec la noblesse. Songez par exemple que, si un universitaire est obligé de dévoiler ses sources (la célèbre et affreuse note de bas de page dont on nous apprend à surcharger nos livres), le journaliste a lui la possibilité de ne jamais dévoiler ses sources. Il a même dans une certaine mesure le devoir ne les point dévoiler, pour les protéger. A charge pour lui évidemment ensuite de les vérifier, de les recouper. Tout un art, qui doit forcer le respect.
L'ennui, évidemment, c'est que le métier est dévoyé par un système usé jusqu'à la corde. Je regarde peu la télévision. Mais ma vieille mère fonctionne souvent pour moi comme un baromètre de ce qui s'y dit. Il y a 7 ans elle mourrait de peur que son village occitan soit attaqué par Ben Laden. Aujourd'hui elle redoute que sa Caisse d'Epargne fasse faillite. J'en ai déduit que c'est parce que depuis 8 jours, la télé lui rebat les oreilles de la crise financière (les médias ne se rendent pas compte des ravages qu'ils provoquent dans les chaumières).
Ce soir un journaliste accordait la parole à Houellebecq et BH Lévy, deux personnages tout aussi antipathiques l'un que l'autre pour des raisons différentes, dont le bouquin allait être commenté pendant vingt minutes. Voilà où en est leur profession.
Beaucoup d'entre eux en ce moment crachent leur haine contre le "journalisme citoyen", les blogs amateurs. Il est vrai que je n'aimerais pas être à leur place. Ils ont beau dire que c'est la technologie qui coule leur métier (la concurrence d'Internet), ou la contrainte financière, leur connivence avec le pouvoir politique et financier est aussi pour beaucoup dans la méfiance des gens à leur égard. Et encore, si seulement les citoyens des pays riches avaient la sagesse de se défier encore plus de leurs médias.
Y a-t-il une chance de sauver les médias ?Je veux dire non seulement de la faillite financière face à Internet, mais aussi de la faillite morale après tant d'aveuglement et souvent tant de mauvaise foi. Inventer des médias alternatifs, oui, mais aussi de grands médias alternatifs professionnels. Dans mon programme pour une gauche décomplexée, j'avais insisté sur le fait que l'Etat devrait prendre cela en charge : recréer des médias publics dignes de ce nom, un vrai journalisme professionnel subventionné au service des citoyens. Le problème est de savoir si ce journalisme là garderait une forme d'indépendance. Question de la possibilité pour les citoyens de contrôler, à tous les niveaux, ce pouvoir politique volontariste que j'appelle de mes voeux. Un Etat fort, au service des citoyens et contrôlé par les citoyens, est-ce concevable, dans le domaine des médias comme dans les autres domaines ou est-ce une contradictions dans les termes mêmes ?
Parmi les rares révolutions attractives en ce moment, il y a celle du Vénézuela. Dans ce contexte beaucoup s'étaient intéressés au projet de TéléSur, qui était une TV révolutionnaire "du Sud" comme son nom l'indiquait. Je l'ai regardée plusieurs fois. Ses programmes étaient de bonne qualité. J'avais cru comprendre que l'on souhaitait faire une TeleSur française, je ne sais plus où en banlieue parisienne. Tele Vive peut-être, ou alors je confonds. J'avais demandé l'an dernier à jeune diplomate vénézuélien s'il pensait qu'on pouvait transposer TeleSur à l'Europe. Sa réponse avait été négative : "trop spécifique, TeleSur répond à un besoin latinoaméricain". Soit, mais alors pourquoi n'y a-t-il rien de comparable en Europe ? Parce qu'il n'y a pas de besoin dans ce sens ? Ou parce qu'aucun Etat n'a tenté de faire une révolution ?
On attend peut-être que la Biélorussie ou la Pridnestrovie lancent leur TeleSur européenne. Je plaisante bien sûr. Le "dernier Etat stalinien d'Europe" comme le présentait Arte il y a 5 ans est courtisé par Bruxelles (et par la Pologne) en ce moment pour qu'il ne tombe pas complètement dans le giron russe (bien qu'ils viennent d'unifier leur défense anti-aérienne avec Moscou), lisais-je récemment. Quant à Tiraspol, son étoile ne brille que pour elle-même.
Il va falloir trouver d'autres solutions...
http://delorca.over-blog.com/article-23615204.html
Le journalisme est une bien noble profession, investie d'ailleurs des privilèges qui vont avec la noblesse. Songez par exemple que, si un universitaire est obligé de dévoiler ses sources (la célèbre et affreuse note de bas de page dont on nous apprend à surcharger nos livres), le journaliste a lui la possibilité de ne jamais dévoiler ses sources. Il a même dans une certaine mesure le devoir ne les point dévoiler, pour les protéger. A charge pour lui évidemment ensuite de les vérifier, de les recouper. Tout un art, qui doit forcer le respect.
L'ennui, évidemment, c'est que le métier est dévoyé par un système usé jusqu'à la corde. Je regarde peu la télévision. Mais ma vieille mère fonctionne souvent pour moi comme un baromètre de ce qui s'y dit. Il y a 7 ans elle mourrait de peur que son village occitan soit attaqué par Ben Laden. Aujourd'hui elle redoute que sa Caisse d'Epargne fasse faillite. J'en ai déduit que c'est parce que depuis 8 jours, la télé lui rebat les oreilles de la crise financière (les médias ne se rendent pas compte des ravages qu'ils provoquent dans les chaumières).
Ce soir un journaliste accordait la parole à Houellebecq et BH Lévy, deux personnages tout aussi antipathiques l'un que l'autre pour des raisons différentes, dont le bouquin allait être commenté pendant vingt minutes. Voilà où en est leur profession.
Beaucoup d'entre eux en ce moment crachent leur haine contre le "journalisme citoyen", les blogs amateurs. Il est vrai que je n'aimerais pas être à leur place. Ils ont beau dire que c'est la technologie qui coule leur métier (la concurrence d'Internet), ou la contrainte financière, leur connivence avec le pouvoir politique et financier est aussi pour beaucoup dans la méfiance des gens à leur égard. Et encore, si seulement les citoyens des pays riches avaient la sagesse de se défier encore plus de leurs médias.
Y a-t-il une chance de sauver les médias ?Je veux dire non seulement de la faillite financière face à Internet, mais aussi de la faillite morale après tant d'aveuglement et souvent tant de mauvaise foi. Inventer des médias alternatifs, oui, mais aussi de grands médias alternatifs professionnels. Dans mon programme pour une gauche décomplexée, j'avais insisté sur le fait que l'Etat devrait prendre cela en charge : recréer des médias publics dignes de ce nom, un vrai journalisme professionnel subventionné au service des citoyens. Le problème est de savoir si ce journalisme là garderait une forme d'indépendance. Question de la possibilité pour les citoyens de contrôler, à tous les niveaux, ce pouvoir politique volontariste que j'appelle de mes voeux. Un Etat fort, au service des citoyens et contrôlé par les citoyens, est-ce concevable, dans le domaine des médias comme dans les autres domaines ou est-ce une contradictions dans les termes mêmes ?
Parmi les rares révolutions attractives en ce moment, il y a celle du Vénézuela. Dans ce contexte beaucoup s'étaient intéressés au projet de TéléSur, qui était une TV révolutionnaire "du Sud" comme son nom l'indiquait. Je l'ai regardée plusieurs fois. Ses programmes étaient de bonne qualité. J'avais cru comprendre que l'on souhaitait faire une TeleSur française, je ne sais plus où en banlieue parisienne. Tele Vive peut-être, ou alors je confonds. J'avais demandé l'an dernier à jeune diplomate vénézuélien s'il pensait qu'on pouvait transposer TeleSur à l'Europe. Sa réponse avait été négative : "trop spécifique, TeleSur répond à un besoin latinoaméricain". Soit, mais alors pourquoi n'y a-t-il rien de comparable en Europe ? Parce qu'il n'y a pas de besoin dans ce sens ? Ou parce qu'aucun Etat n'a tenté de faire une révolution ?
On attend peut-être que la Biélorussie ou la Pridnestrovie lancent leur TeleSur européenne. Je plaisante bien sûr. Le "dernier Etat stalinien d'Europe" comme le présentait Arte il y a 5 ans est courtisé par Bruxelles (et par la Pologne) en ce moment pour qu'il ne tombe pas complètement dans le giron russe (bien qu'ils viennent d'unifier leur défense anti-aérienne avec Moscou), lisais-je récemment. Quant à Tiraspol, son étoile ne brille que pour elle-même.
Il va falloir trouver d'autres solutions...
http://delorca.over-blog.com/article-23615204.html